L’INTIME: LE COLLECTIONNEUR DERRIÈRE LA PORTE _ LA MAISON ROUGE (2004 - 2018)
- Uyen Vu
- Mar 31, 2020
- 9 min read
L’essai portera sur l’analyse des impacts sur les collectionneurs privés et sur l’inauguration de l’exposition «L’intime: collectionneurs derrière la porte» de La Maison Rouge créée en 2000 par Antoine de Galbert dédiée à l’art contemporain.
Au début du 21ème siècle où l'art contemporain était vibrant et actif en Amérique et dans d'autres pays mais il restait très discret en français ainsi que ses collectionneurs privés. Ce qui est sans aucun doute la spécificité de la France, c'est qu'elle a préféré l'héritage de l'ancien temps à la nouvelle forme d'art contemporain. Les relations avec les musées, les problèmes financiers liés aux prix des œuvres d'art et à la fiscalité ont également influé sur la façon dont les collectionneurs privés ont gardé leur profil bas.
''L’intime: Le collectionneur derrière la porte'' est une exposition qui expose au public la corrélation entre les collectionneurs privés et leurs collections. Elle est considérée comme l'inauguration la plus essentielle qui a fondamentalement posé les bases de la fondation La Maison Rouge d'Antoine de Galbert en 2004, lorsque les collectionneurs d'art français ont préféré garder l'anonymat de leurs noms. Il a fallu un certain temps pour convaincre les collectionneurs d'art de révéler ce qu'ils ont au public, à la fois dans leur collection et eux-mêmes, même pour Antoine de Galbert, malgré le fait que ce soit lui qui ait ouvert ce concept, pour enfin dévoiler une partie de sa collection.
Antoine de Galbert, un collectionneur silencieux d'art contemporain en français.

(source dimage: Paris Match <parismatch.com>)
Antoine de Galbert, avant de devenir une figure incontournable de la scène artistique française, s'est d'abord fait connaître en tant que contrôleur de gestion alimentaire et héritier de l'entreprise familiale: le groupe Carrefour. Pour son amour de l'art, il a pris plaisir à dessiner des aquarelles, puis a commencé à collectionner des dessins. À 30 ans, avec de solides revenus financiers, Galbert a ouvert sa première galerie d'art à Grenoble en 1987 et depuis, le profil de collectionneur d'art s'est étendu. L'intérêt de Galbert pour l'art contemporain, plutôt que pour l'art classique, a principalement expliqué sa contribution au monde de l'art français, y compris la création de La Maison Rouge (spécialisée en art contemporain), à une époque où la collection d'art contemporain était douteuse pour le public. Et comparativement à d'autres collectionneurs, Galbert est considéré par les gens autour de lui comme plutôt timide, mais il a un oeil attentif et est très instinctif dans le choix des oeuvres d'art dans sa collection d'élite. Il n'hésite pas à explorer et investir dans des artistes anonymes et leurs créations. Les événements les plus récents auxquels Galbert a contribué sont de faire don de sa collection de coiffes ethniques au Musée de Confluence à Lyon et d'organiser l'exposition de sa collection à Grenoble 2019, d'autres expositions à Arles, Landerneau. Sans oublier de mentionner l'une de ses plus grandes contributions sur la scène artistique française: La Maison Rouge fondée en 2004.
La Maison Rouge
La Maison Rouge a choisi de présenter les collections privées comme moteur de programmation, que l'on ne voyait à l'époque que dans les musées ou centres d'art français. Elle est de soutenir et d'explorer les différents aspects de l'art contemporain dans son expérimentation et son expression artistiques, souvent dans des collections privées internationales. Il a acquis son statut caritatif en vertu du droit français et officiellement mis en service le 31 janvier 2003. L'espace total de La Maison Rouge est de plus de 2 000 m2 rénové par Jean-Yves Clément et Jean-Michel Alberola, un patio (organisé autour du rouge pavillon peint) pour les expositions en plein air et une salle multimédia pour les conférences et concerts, 1 300 m2 d'exposition dans un espace dédié aux spectacles monographiques des artistes contemporains avec le sous-sol (ou le vestibule) comme deuxième espace d'exposition réservé aux jeunes créateurs, aux «artistes oubliés» , travaille à réactiver, à redécouvrir »d'après Galbert. Pendant 14 ans de fonctionnement, La Maison Rouge a organisé de nombreuses expositions remarquables comme «Black Dolls», «Under Influences», «My Joburg», ect.
Ni galerie, ni musée, la fondation vise à favoriser les démarches de création contemporaine, à soutenir des projets et à promouvoir les activités et l'image de La Maison Rouge en France et à l'étranger. Il a présenté ses structures et ses plans clairs dans des collections internationales présentées une fois par an, organisé diverses activités telles que des déjeuners d'ouverture avec des artistes et des conservateurs, et ouvert des conférences et des débats, organisé régulièrement 3 à 6 expositions d'art, chaque année depuis l'ouverture anticipée jusqu'à sa fermeture fin 2018. Dans le patio, les amis de Galbert peuvent chaque année choisir et produire une œuvre pour le patio. La Maison Rouge a également organisé de nombreux voyages et visites tels que des visites privées d'expositions, des visites d'ateliers, des visites de collections privées, etc.

Le patio (Source d’image: paris-promeneurs)
La fondation compte 131 expositions en tout et accueille environ 100 000 visiteurs chaque année. Même si Galbert a mis un terme à sa grande fondation La Maison rouge, la Fondation Antoine de Galbert reste pour soutenir la création dans l'art moderne et contemporain et les artistes.
La position méconnue des collectionneurs privés sur la scène artistique française.
L'art contemporain d'il y a vingt ans n'était pas au centre des projecteurs comme il l'est
aujourd'hui, il en est de même pour leurs collectionneurs qui s'y intéressent. Alors qu'à cette époque, il y avait de nombreux collectionneurs privés à travers le monde, comme en Amérique, ayant confiance pour montrer activement leurs oeuvres d'art au public ou dans les pays anglophones, où ce sont les collectionneurs qui ont culturellement formé les musées, ou les centres d'art pour exposer leurs collections. Les collectionneurs français, au contraire, ont gardé leur profil bas ou anonyme pour des raisons de sécurité, par peur des autorités fiscales, en partie parce que l'art contemporain ne gagnait pas encore beaucoup de confiance de la communauté artistique française. Même Pinault François, qui possède de nos jours la plus grande collection d'art contemporain, restait à l'époque aussi discret que les autres. La plupart des collectionneurs privés ont préféré que leurs noms restent confidentiels lorsqu'ils ont prêté leurs collections à des institutions, des musées constitués par l'État, il est donc absurde d'avoir une bonne idée du rôle des collectionneurs sur la scène artistique, en particulier en France.
Les collectionneurs d'art jouent un rôle majeur dans de nombreux aspects du système artistique, notamment le marché, les artistes, les institutions, etc. Ils viennent d'horizons différents, pas nécessairement de la même industrie, ils peuvent être médecin, homme d'affaires, biologiste, motivés pour acquérir une oeuvre soit comme investissement, soit comme désir de contribuer à la scène artistique. De manière générale, les collectionneurs d'art ont un enseignement supérieur (au moins au niveau du baccalauréat) et une certaine connaissance artistique importante dans ce domaine, car la collecte d'oeuvres d'art nécessite de sérieux investissements en temps, en énergie et en beaucoup d'informations. Un état financier et des ressources solides sont évidemment une exigence du fait que l'acquisition d'oeuvres d'art demande un budget régulier, cela peut signifier acheter l'art, mais aussi soutenir les artistes en matière financière ou matérielle.
Les collectionneurs sont capables de reconnaître des artistes précieux pour la communauté.Cela explique pourquoi plus de la moitié des collectionneurs d'art en France ont affirmé être impliqués avec des artistes de différentes dimensions, allant du soutien financier à la rencontre directe, qui bénéficient mutuellement au deux parties. Pour les artistes, cela pourrait être une croissance positive pour leur carrière lorsque les collectionneurs sont capables de collecter des fonds, de soutenir la distribution et de susciter l'intérêt pour les artistes et leurs oeuvres en raison de nombreuses relations et connexions adéquates avec d'autres participants que les collectionneurs ont dans leur cercle. De plus, les collectionneurs ont la capacité d'influencer la vie artistique et les créations par leur contribution au soutien matériel des artistes.
La diversité des relations avec les autres participants, comme avec les conservateurs, les historiens de l'art et les galeristes, aide à mieux confirmer que les collectionneurs sont en mesure d'influer sur les créations artistiques ainsi que sur le marché de l'art lorsqu'ils continuent à amasser des collections culturelles importantes. Cependant, leur implication auprès des institutions demeure aussi compliquée qu'il y a vingt ans. Les échanges en termes d'oeuvres d'art et d'administration créent une interconnexion entre les collections et les institutions en France, par exemple lorsque les collectionneurs soutiennent les productions culturelles, les musées proposent leurs services, comité d'acquisition, connexions exclusives et reconnaissance. En fait, plusieurs collectionneurs ont déclaré que les musées ne les reconnaissaient pas pleinement comme des partenaires égaux. En outre, les musées étant constitués par l'État, ils n'ont pas proposé autant d'avantages pour encourager les donateurs, qui sont généralement des collectionneurs d'art, alors que dans d'autres pays comme l'Amérique les musées offraient en contrepartie une déduction fiscale. Les collectionneurs privés montrent beaucoup de soutien à leurs artistes en rendant leurs oeuvres visibles, mais cela a été limité par les choix esthétiques créés par les musées.
La montée des fondations privées et l’exposition L’intime (du samedi 5 juin au dimanche 26 septembre 2004)
Le public d'aujourd'hui a plus de connaissances sur les collections privées et ses propriétaires lorsque les collectionneurs peuvent exposer leurs collections, et en prendre le contrôle, en organisant leurs propres expositions ou en créant une fondation; mais à l'époque ils préféraient se cacher. Les collectionneurs ont pris leurs mesures et ont commencé à contester l'ancien système, certains le font parce qu'ils ressentent un sens des responsabilités envers le public.
L'exposition Passion Privée, organisée en 1995, a donné l'exemple pionnier de montrer leurs collections privées, mais seulement un tiers des collectionneurs ont accepté de se révéler. Nous avons également la Fondation pour l'art contemporain de Daniel et Florence Guerlain dans le Mesnul, et après c'est Jean-Marc Salamon qui a choisi de dévoiler sa collection en ouvrant sa propre fondation en 2001. Antoine de Galbert a suivi le même chemin, en ouvrant Fondation La Maison Rouge à Paris pour soutenir les collections privées avec son exposition d'inauguration ''L'intime, le collectionneur derrière la porte'', qui montre sa profonde préoccupation tant pour les collections privées elles-mêmes que pour leurs collectionneurs. Ce nouveau changement révèle une confiance accrue des particuliers dans leurs choix. Cela pourrait être utilisé pour défendre des artistes mal représentés dans des institutions standardisées selon le galeriste Georges-Philippe Vallois.

(source d’image: Thierry Germe Architects )
La Maison Rouge est adaptée de l’idée originale de Gérard Wajcman, psychanalyste et co-commissaire de l’exposition ''L’intime , le collectionneur derrière la porte''. L'exposition qui a été temporairement présentée pendant trois mois, représente les seize salles ressuscitées (1 réserve, 1 chambre, 2 salles à manger, 4 cabinets de toilette, 1 salle de bain, 1 bureau, 3 halls d'entrée, 1 grenier, 1 salon. ..) de quatorze résidences de collectionneurs privées différentes.

Cartes de l'exposition Intime (source d’image: Thierry Germe Architects)
En détails:
L’entrance: une introduction couvrant l’espace et les murs dédiés au passage, contenant les sculptures tapissées d’œuvres de toutes origines. Quelques œuvres d'art: À cette figure sourde, muette et aveugle font pendant les yeux mécaniques de Faim de Tigre (2000) de Nicolas Darrot, Hommage à mon neurone (2000), En avance sur l'institution (1996) de John Isaacs.
Le salon: un mélange de livres, de meubles et d'œuvres d'art disposés partout dans la pièce au sol comme aux murs. Quelques œuvres: le tableau de Bernard Frise, Essence (1999), Blue eyes (1982) de Ange Leccia, fauteuils de Ludwig Mies van der Rohe, un canapé ancien et un repos pied de Charles Eames.
Le bureau: une connexion de la salle de travail et des œuvres d'art avec des tables de travail, des ordinateurs, des photographies. Oeuvres: Religieuse de Pierre Chareau (1923), Paul McCarthy (Un ours sur une table, 1992), ect.
La salle à manger: deux salles de collectionneurs, l’un est passionné de design, de photographie. Quelques oeuvres exposées: les photographies d’Ettore Sottsass en 1973, rue Younge n ° 1 ou n ° 4, 1995, de Robin Collyer. L’autre, un couple de jeunes collectionneurs attentifs aux artistes de leur génération: derrière les portes de Passage (2002) de Françoise Doléac, Jeunes travestis (1991) de Didier Trenet, une collection de céramiques européennes et orientales
Le vestibule: par des collectionneurs italiens avec deux miroirs de Michelangelo Pistoletto en vis à vis, portrait de Meret Oppenheim par Man Ray: Plagio, des aquarelles du jeune français Fabien Verschaere (Making to feed, 2001), etc.
La réserve: Le box de stockage où les collectionneurs louent pour stocker les oeuvres.
Les toilettes: quatre cabinets de toilettes comprenant des nus érotiques de Nobuyoshi Araki à Richard Kern, de Terry Richardson à Tørbjørn Rodland, les tirages photographiques, œuvre historique de Berndt et Hila Becher, les objets aux rituels religieux.


(source d’images: Thierry Germe Architects)

(source d’image: La Maison Rouge Fondation)
C'est un mélange d'espaces séparés de la salle à manger, de l'entrée de l'escalier et même de toilettes retravaillées à partir de la disposition d'origine, des intérieurs copiés mais avec plus de 500 véritables oeuvres d'art à afficher dans l'exposition. La relation esthétique quotidienne entre les collectionneurs et les collections est apparue comme un concept principal où les visiteurs peuvent percevoir comment les collectionneurs organisent personnellement des oeuvres d'art dans leur vie. Pour Galbert, il évoque l'idée d'être un voyeur pour apprendre tous les coins et recoins d'un lieu saint que seuls les initiés peuvent comprendre.
Chaque collectionneur a accepté de se séparer temporairement d'une partie de sa collection pour cette exposition qui peut être considérée comme une forme actuelle d’art contemporain, car chaque espace exposé dans ''L’intime'' présente la spécificité des quatorze collectionneurs, différemment des autres expositions où les oeuvres étaient organisées en séries, un art dans l’art à vrai dire. Il révèle un aspect diversifié du mélange de modes de vie, du monde de la mode, de culture différentes, telles que perçues par un collectionneur d'art, dans ses choix et acquisitions d'oeuvres, pièces et objets d'art.
Conclusion
Pour Antoine de Galbert, il aura fallu plusieurs années de préparation avant l'ouverture officielle de l'exposition ''L’intime'' en 2004, tant en finance qu'en localisation, tandis qu'a l'époque les musées refusaient d'accueillir l'idée. Galbert a réhabilité le terrain vague acheté en 2000 pour l'utiliser comme Fondation La Maison Rouge. Après l’exposition ''L’intime'', la fondation a continué d’exposer des collections privées hétérogènes, connues et inconnues, reçues directement par les collectionneurs plutôt que par les conseillers. Il a tenu une variété de conférences, de programmes culturels, invité des intellectuels à venir partager et débattre de leurs opinions ainsi que des artistes pour faire y faire leurs performances, etc. Pour Galbert, c'est assez spectaculaire lorsque le nombre de personnes qui viennent visiter la fondation est d'environ 100 000 par an; il atteint parfois 1000 personnes le dimanche. La fermeture de La Maison Rouge a conduit à une nouvelle action de mécénat pour Galbert dans le développement de sa future fondation Antoine de Galbert qui contribue à promouvoir et défendre les créations d'artistes.
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